lundi 9 octobre 2023

La chronique du jour: Roger Waters - The Dark Side Of The Moon Redux



Voici donc cette fameuse relecture de The Dark Side Of The Moon par Roger Waters, qui était, faut-il le rappeler, l'unique parolier et le compositeur d'environ 50% de la musique de cet album. Waters a fait les gros titres ces derniers temps avec des sorties plus ou moins contrôlées sur la situation géopolitique actuelle du monde, mais il n'en sera pas question ici, on ne parlera que de musique pour ne pas tout mélanger.

On commence donc par "Speak to me", et là déjà premier changement: plus d'hélicos, de rires sardoniques... Waters nous récite les paroles de "Free four", morceau de sa composition qui figure sur Obscured By Clouds. Choix pas aberrant car la mort, thème récurrent de The Dark Side Of The Moon, est fortement évoquée dans ce texte. Soit, on valide.

"Breathe" suit, et là les problèmes commencent. Que Waters murmure plus qu'il ne chante, en soi, c'est pas un problème. Par contre, le son de batterie de Joey Waronker est horrible, faisant penser à une machine à laver des années 80 en fin de vie. Choix incompréhensible, d'autant plus que Waronker, quand il officiait avec notamment R.E.M., n'avait pas du tout ce son là. La batterie étant en plus mixée très en avant, ça gâche quand même pas mal le spectre sonore du titre.

"On the run": là, ça commence à déconner sévère. Waters, de sa voix sépulcrale, récite un texte dont on perd très rapidement le fil. On entend très vaguement en fond sonore le thème de "On the run", mais avec un son évoquant un Jean-Michel Jarre qui se serait endormi sur ses claviers. C'est vraiment pas beau du tout, en plus même pas d'explosion à la fin pour faire la transition avec "Time", où va le monde je vous jure.

"Time" se retrouve donc dépouillée jusqu'à l'os. Une fois que Waters a fini de réciter son texte - on préférait encore l'agression sonore des pendules de l'originale -, la chanson démarre, et là, faut avouer, c'est pas inintéressant du tout. Les envolées de cordes, de nappes de synthé - et d'un theremin - "remplacent" de manière cohérente la guitare Gilmourienne, et ça met en lumière la très jolie mélodie de ce titre. Seul problème: toujours cette satanée batterie. Mais pourquoi donc avoir choisi un tel son? Ca dénote complètement par rapport au reste de l'instrumentation, et il aurait fallu à l'évidence un son sec, "à la Mason" en fait, pour lier le tout. Ici, ça ne le fait clairement pas.

"The great gig in the sky" se transforme en "The great boring in the sky". On peut parfaitement ne pas accrocher aux vocalises de Clare Torry présentes sur la version originale, mais là, cette version redux est une véritable tannée auditive. Waters nous récite de nouveau un texte difficilement bitable, pas du tout en rythme - donc pas du tout comme Leonard Cohen pouvait le faire sur ses derniers disques - sur une version aseptisée du titre d'origine, avec de vagues choeurs moulinés à l'auto-tune et à la cabine Leslie. Ecrivons-le: c'est chiant à mourir.

"Money", premier extrait de l'album dévoilé il y a quelques semaines, est toujours très loin d'être convaincante. On aurait aimé une version franchement bluesy à l'instar de celle jouée par Waters pour le documentaire de la série des "Classic albums" consacré à The Dark Side Of The Moon. Là, c'est plus une version "jazz sous Lexomil" à laquelle on a droit, et on commence sérieusement à piquer du nez. Et ce n'est pas le énième texte débité par Waters à la place du solo de guitare qui sauve l'affaire, bien au contraire...

"Us and them": premières secondes: la batterie maudite. Argh. Waters se donne cette fois la peine de chanter, mais la décision de faire un refrain mou du genou, sans les grandes envolées lyriques, est un pari risqué. La mélodie est toujours aussi belle, mais il manque quand même quelque chose. Par contre le solo de saxo remplacé par des plans de guitare acoustique mâtinés d'orgue hammond, franchement, c'était pas indispensable.

"Any colour you like": ah, ça y est, on touche le fond. 128ème récitation d'outre-tombe de Waters, qui nous parle des drapeaux de toutes les couleurs, pour finir par nous dire que le drapeau le plus important c'est le drapeau arc-en-ciel. Merci de fermer la porte ouverte que vous venez de défoncer, M. Waters! Franchement, quel contraste avec la finesse d'écriture qui était la sienne au moment d'écrire les textes de la version originale de cet album... Et puis alors musicalement, une vraie purge, alors que ce morceau était sublimé dans les versions live de 73-74. On entend une volonté de faire sonner ce morceau comme un extrait du Melody Nelson de Gainsbourg, notamment avec cette basse mise en avant, mais c'est un flop monumental.

"Brain damage / Eclipse": morceaux ralentis par rapport aux originaux, mais Waters fait là aussi l'effort de chanter pour de bon. Arrangements de cordes intéressants. On va dire que ça passe.

Bilan des courses: l'intérêt de cette relecture apparaît extrêmement limité, pour ne pas dire nul. On ne sait pas trop ce qui a pu motiver Waters pour produire ce disque, car tout fan de Pink Floyd sait combien The Dark Side Of The Moon lui doit, mais sait aussi qu'il n'était pas tout seul dans la création de cette oeuvre. Ce "redux" vient le confirmer, car finalement, l'auditeur n'a qu'une envie: écouter à fond la version originale. Et on se doute que ce n'était pas vraiment la volonté de Waters d'aboutir à ce résultat!...

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