mercredi 7 juin 2017

Arcade Fire, Lyon, Théâtre Antique de Fourvière, 5 juin 2017

(avec un petit bonus en fin de compte-rendu...)

Je dois avouer que j'avais une petite appréhension lundi soir, à savoir la peur d'être déçue. Pourtant j'avais déjà vu les Canadiens au même endroit en 2007, puis à la Halle Tony Garnier en 2010, et cela avait énorme la première fois, et "seulement" très bon la seconde, la faute à une salle pas du tout configurée pour un groupe comme celui-ci, et avec un son très très moyen.

Oui mais voilà, après trois premiers albums qualifiables sans exagérer d'exceptionnels (Funeral, Neon Bible et The Suburbs), Reflektor en 2013 avait un peu douché mon enthousiasme. Certes l'album comportait des très bons passages, mais l'ensemble m'avait moins emballé, notamment à cause de morceaux traînant en longueur et à un concept quelque peu fumeux (création d'un deuxième groupe fictif...). Qu'allait donc nous réserver ce concert, deuxième "vraie" prestation de la tournée, plus d'un mois avant la sortie d'un nouvel album, Everything Now?

Cela nous réserve d'abord une première partie fort agréable, à savoir Barbagallo, qui, en plus d'être le batteur - français - de Tame Impala, gère en parallèle un projet solo. Entouré d'un clavier, d'une bassiste et d'un guitariste, ce batteur-chanteur nous a livré une demi-heure de pop synthétique planante du meilleur goût, oscillant entre Air et...Tame Impala justement. Dommage malheureusement que le son ait été très mal réglé, le clavier, la basse et la grosse caisse écrasant tout. Il a fallu deux morceaux pour que je comprenne que le gars chantait en français et pas en anglais...

Arcade Fire étant le nombre qu'ils sont sur scène (j'ai renoncé à compter depuis longtemps), le changement de plateau prend un temps certain, et c'est à 22h15 que le groupe prend possession du théâtre antique, avec un écran géant derrière eux projetant le mot NOW et sur fond du nouveau single "Everything now" mais en version instrumentale ralentie. Le décor est planté, Win Butler dit "one, two, three, four" et là...deux constats;
1: les Romains ont bien fait de ne pas mettre de tapisseries sur leur théâtre, car là elles se seraient décollées instantanément
2: les Canadiens n'ont pas fait le voyage pour enfiler des perles

Parce qu'ils attaquent d'emblée par leur hymne fédérateur "Wake up". Là comme ça, sans prévenir. Alors que n'importe quel groupe mettrait une telle chanson à la fin de leur set, non, eux, c'est au début. Tout le monde fait "ho ho hoooooo", plus personne n'a de voix au bout de 30 secondes, les gars et les filles sur scène sont déjà à 101%, tout est normal.

Clac ça enquille derrière sur "Everything now", single sorti depuis trois jours seulement...et c'est déjà un hymne. Ah ben mince elle est bonne celle-là. Si on pouvait tiquer sur l'aspect un peu léger du morceau dans sa version studio, plus aucun doute avec la version live: c'est un tube en puissance.

Après ça, trois morceaux pour faire monter doucement la sauce: "Haïti" chantée par la miss Chassagne, un énorme "Here comes the night" avec light-show déconseillé aux épileptiques présents, et la turbine ambulante "No cars go". 

Et ensuite, cinq moments de grâce, de pureté. Cinq chansons où les Arcade Fire prouvent qu'en plus de savoir être pied au plancher et de savoir jouer plein d'instruments (le batteur passant parfois derrière le piano, idem pour la violoniste, Chassagne jouant de l'accordéon, des marimbas, de la batterie, des claviers...), ils savent aussi faire dans la nuance, dans le délicat.

"Windowsill" d'abord. La ballade que Springsteen a oublié d'écrire. Poignante. "Neon Bible" derrière. A peine deux minutes suspendues dans le ciel lyonnais, avec Régine Chassagne se faufilant dans l'écran géant en train de feuilleter cette bible lumineuse. Clac, "The suburbs" avec sa petite soeur "The suburbs (continued)". Là c'est Neil Young qu'on croit entendre, avec ce rythme claudiquant et cette voix haut perchée. Intro suivante: un arpège en ré mineur. Ah c'est pas vrai, "Suburban war", une de mes préférées qu'ils jouent rarement! Dans mes bras les enfants! J'ai des frissons partout, et pourtant il ne fait pas si froid que ça.

Après ces minutes pleines de grâce, le train fou va reprendre sa course infernale, et cette fois sans pause. "Ready to start" pour reposer les bases, "Sprawl II" chantée de façon inimitable par Régine Chassagne, qui s'emberlificote en plus dans une guirlande offerte par le public. Je me trompe ou c'est une pop song parfaite???

Même pas le temps de souffler que la fascinante "Reflektor" débarque. Morceau ovniesque, oppressant, musicalement d'une très grande richesse et aussi un peu émouvant lorsque Win Butler chante la partie qu'interprète David Bowie sur la version studio. "Afterlife" suit parfaitement derrière, et après on a eu la seule toute petite longueur à mon goût avec "We exist", morceau que je trouve interminable. Heureusement il est compensé par un extrait du futur album, "Creature comfort", très intéressante, même si Régine Chassagne massacre un peu sa partie vocale.

Le final est dantesque: "Neighborhood #3 (Power out)", avec un son de guitare sur les refrains qui redécolle le papier peint que Caïus Nenpeuplus avait patiemment remis pendant le concert. Et puis évidemment LE chef d'oeuvre à jamais du groupe: "Rebellion (Lies)", avec ce final déchirant, et qui le sera encore plus avec un Will Butler faisant semblant d'être prisonnier à l'intérieur de l'écran géant. Bluffant, grandiose, immense.

Au rappel, un seul morceau, mais quel morceau: "In the backseat", puissante ballade chantée par Régine Chassagne de sa voix de petite fille de 40 ans.

Ils tirent leur révérence après 1h45 de concert assez fabuleux, qui confirme si besoin en était le caractère unique et inclassable de ce groupe. Et la preuve que je ne vous ai pas menti, vous pouvez visionner l'intégralité du concert ci-dessous (les endroits où vous pouvez retrouver chaque morceau sont indiqués sous la vidéo):


Reste maintenant à attendre le 28 juillet pour la sortie de Everything Now, qui sera en plus coproduit en tout ou partie par Thomas Bangalter de Daft Punk. Pas de doute, ce groupe n'a pas fini de nous étonner!

Set-list du concert ici.

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