21st century schizoid man (including "Mirrors")
I talk to the wind
Epitaph (including "March for no reason" and "Tomorrow and tomorrow")
Moonchild (including "The dream" and "The illusion")
The court of the crimson king (including "The return of the fire witch" and "The dance of the puppets")
Paroles & musique: Robert Fripp, Ian McDonald, Greg Lake, Michael Giles & Peter Sinfield, sauf:
"I talk to the wind" & "The court of the crimson king": paroles & musique: Ian McDonald & Peter Sinfield.
Production: King Crimson
Durée: 43:53
Date de parution: 10 octobre 1969
Attention, nous voici en présence d'un véritable OMNI, objet musical non identifié. Bien malin celui qui saura décrire la musique de cet album. Bien sûr, l'étiquette "rock progressif" vient tout de suite à l'esprit: les chansons sont longues, souvent à tiroirs, les paroles sont parfois...particulières (rien que le nom de l'album, "Dans la cour du roi cramoisi", on pressent qu'on ne va pas écouter un album de punk), mais ce constat est extrêmement réducteur. En réalité, les King Crimson condensent sur ce disque (leur premier!!!) en moins de 45 minutes la quasi totalité des styles musicaux.
Bien évidemment, pour cela, il faut des musiciens de haut vol. Leader de la formation, Robert Fripp est un surdoué de la guitare, mais possède un style tellement personnel qu'il est difficile de le considérer comme un véritable guitar hero. Dans le groupe qui enregistre cet album, citons également Greg Lake, futur bassiste de Emerson, Lake & Palmer. Bref, pas des manches les garçons.
Ca commence par cet "homme schizophrène du 21ème siècle". Tout un programme. De drôles de bruits de soufflerie, puis un riff survient. Un truc que Page, Hendrix et consorts n'auraient pas renié. Un truc hyper violent, sale, cradingue. Première claque. La voix débarque. Et quelle voix! Celle de Greg Lake justement, complètement distordue, trafiquée, flippante. Et les paroles qu'elle débite ne sont pas du genre à rassurer l'auditeur. "Innocents raped with napalm fire"... On se marre assez peu. La chanson suit son cours, on arrive au pont, on s'attend à un solo de guitare, et on a bien un solo mais de...saxophone free jazz, avec changement de tempo à la clef.
Là, l'auditeur ne sait plus où donner de l'oreille. Ce passage instrumental est assez hallucinant, tellement il est inattendu et en même temps parfaitement maîtrisé. Une petite pause, puis reprise du riff, dernier couplet, et final cahotique en diable. Fin du 1er round. Autant dire qu'on en redemande.
Et là, le groupe balance tout l'inverse. "I talk to the wind" est une ballade vaporeuse, évanescente, avec une ligne de basse splendide, des harmonies à deux voix de toute beauté, bref un contre-pied total par rapport à la baffe précédente. Fortiches les garçons.
"Epitaph" ensuite. Là, ça redevient sérieux. Le mellotron est de sortie sur cette ballade somptueuse, aux paroles encore hyper sombres ("Confusion will be my epitaph"... "Yes I fear tomorrow I'll be crying"...), mais encore une fois parfaitement menée. Ca pourrait être pompeux et prétentieux, mais ça s'arrête juste à la limite du too much. Fin de la face A du vinyle (hé oui, c'était l'époque).
La face B démarre par "Moonchild". Là, soyons honnêtes, c'est la seule longueur du disque. Si les deux premières minutes chantées sont fort sympathiques, les 10 minutes suivantes où on entend les musiciens improviser à faible volume sur leurs instruments peuvent en rebuter plus d'un. Même si c'est une improvisation moins agressive à l'oreille que, au hasard, le "Interstellar overdrive" de Pink Floyd, on s'embête quand même sévèrement au bout d'un moment. Là on se dit que les gars ont tout donné sur la face A, que la face B va être du remplissage...
Fatale erreur.
Car voici "The court of the crimson king". Et là, dès l'intro avec du mellotron de partout, on sent qu'on tient un grand, un très grand morceau. Et ça va être le cas tout au long des 9 minutes de cette chanson grandiose. Ca n'est jamais lassant, il y a des arrangements d'une beauté stupéfiante (les deux passages instrumentaux sont des modèles du genre), les paroles sont surréalistes à souhait dans la description de la cour du roi cramoisi, les choeurs sont immenses, la partie de batterie Michael Giles est dantesque... Bref, c'est parfait. Et puis il y a même une fausse fin! On croit que tout est terminé, et paf, on remet un coup du thème du morceau, avec Giles faisant 10000 roulements de toms à chaque break. Et là, ça se termine pour de bon.
L'album connut un immense succès, aidé en plus par une pochette démoniaque (son auteur décèdera malheureusement l'année suivante), et influencera pour ainsi dire tous les groupes se réclamant du rock progressif dans les années 70. Mais, comme indiqué plus haut, la musique de King Crimson va bien au-delà du rock progressif, tellement Fripp et ses acolytes semblent évoluer complètement en-dehors des sentiers battus.
La suite de l'aventure crimsonienne sera mouvementée: le groupe connaîtra approximativement 16465132 formations, avec pour seul élément stable Robert Fripp, et connaîtra aussi de longues périodes d'inactivité. Mais il signera également d'autres albums de très grande qualité (Islands et Red pour ne citer qu'eux) et continue actuellement de sillonner les routes du globe en donnant des concerts de très haut vol. Mais s'il ne reste qu'un seul album à retenir de leur discographie, c'est bien celui-là.
A noter que la discographie de King Crimson ne se trouve pas facilement sur les plate-formes de téléchargement, ni sur YouTube. Il vous faudra donc dépenser quelques euros pour découvrir cette merveille, mais promis, vous ne le regretterez pas...
Il a quand même un peu vieilli cet album. Perso, je préfère la période suivante avec le line-up Fripp, Wetton, Bruford
RépondreSupprimerCertes, certaines sonorités et l'improvisation de "Moonchild" ont pris un coup de vieux. Mais l'avancée musicale représentée par cet album demeure considérable, ce qui n'enlève en rien la qualité de nombreux albums de King Crimson par la suite.
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