mardi 16 janvier 2018

Dolores O'Riordan 1971 - 2018

Les 35-40 ans qui nous lisent le confirmeront: en 1994, il était tout bonnement impossible de passer à côté de "Zombie", titre qui défilait en rotation lourde sur les radios et télé diverses, et qui était porté à la fois par un clip qui frappait l'imagination (mais qui paraît bien daté aujourd'hui) et surtout par une voix féminine venue de nulle part, chantant d'une façon extrêmement originale. Nous découvrions ainsi les quatre irlandais des Cranberries, qui, après un premier album en 1993 passé relativement inaperçu, sortaient donc l'année suivante ce qui demeure un excellent disque,  No Need To Argue, le groupe étant bien aidé par le producteur Stephen Street (The Smiths, Blur) pour tirer le meilleur de lui-même.

Dolores O'Riordan et son charisme indéniable allait ainsi frapper les esprits des adolescents que nous étions, et les autres singles extraits de l'album en question ("Ode to my family", "I can't be with you") furent aussi des vrais cartons. Nous étions ainsi fébriles à l'annonce de la sortie en 1996 de l'album suivant, To The Faithful Departed, et manque de pot, ça a été la douche froide. Production hyper lourdingue (merci Bruce Fairbairn), O'Riordan qui commence à verser dans le prêchi-prêcha (la guerre c'est mal, les enfants c'est gentil...) avec des déclarations également pas spécialement progressistes en terme de droit à l'avortement, et parfois franchement maladroites ("c'est curieux, il y a beaucoup de noirs à nos concerts"...). C'est là aussi qu'on s'est rendu compte de la fragilité psychologique de la chanteuse, fragilité qui va provoquer l'annulation d'une bonne partie de la tournée européenne.

Heureusement, un Bury The Hatchet plus apaisé, verra le jour en 1999, avant un Wake Up And Smell The Coffee un peu en pilotage automatique (2001). Ensuite ce sera best of, séparation, album solo, reformation, tournée best of, un album pas mémorable (Roses) en 2012 et un best of unplugged (Something Else) en 2017. Autant l'avouer: l'heure de gloire de Dolores O'Riordan, ce fut dans les années 90, après l'engouement fut moindre, même si la popularité du groupe était intacte en Irlande.

A titre tout personnel, j'ai vu le groupe trois fois sur scène: deux fois sur le "Loud and clear tour" (en 1999 et 2000), et une fois sur le "Wake up and smell the coffee tour" (2002). C'était très pro, avec une O'Riordan en meneuse de troupe irréprochable, mais je dois reconnaître que le concert de 2002 m'avait fait prendre conscience que, doucement mais sûrement, je m'étais éloigné de cette musique qui avait pourtant bercé mon adolescence, et que j'étais passé à autre chose.

C'est peut-être pour cela que la disparition brusque de Dolores O'Riordan à seulement 46 ans me touche particulièrement, car c'est clairement une part de ma jeunesse qui a ainsi fichu le camp. En hommage à la dame, je posterai mon morceau favori du groupe, "Daffodil lament". Extrait de No Need To Argue, cette chanson, écrite par O'Riordan, montre ce que les Cranberries étaient capables de faire lorsqu'ils étaient bien entourés. Une chanson à la construction audacieuse et aux mélodies bien tournées, sans parler de la production made in Stephen Street parfaite. Rien que pour cette belle année 1994, merci Mme O'Riordan.


Paroles & musique: Dolores O'Riordan.
Production Stephen Street.

3 commentaires:

  1. Une part de ma jeunesse s'envole également... En ré-ecoutant avec mes oreilles de maintenant l'influence des Smiths est assez frappante,d'ailleurs pour l’anecdote outre le producteur cité sur No Need to Argue O'Riordan a monté à un moment un groupe avec leur bassiste ! Une petite préférence de mon côté pour le 1er album ("tout le monde le fait donc pourquoi pas nous", ce titre :) qui contient moultes succulentes madeleines de Proust

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  2. Je confirme pour les Smiths: les arpèges, c'est du Johnny Marr dans le texte ;-)

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  3. Oui, un peu pareil ici, sauf que je les avais découvert un chouia plus tôt à la faveur d'un CD ramené de Londres, où le premier album avait déjà été un carton. Du coup, j'avais pu les voir à La Cigale sur la tournée de No Need To Argue.

    Après j'avais mes places pour Bercy sur la tournée suivante, mais concert annulé parce que déjà, Dolores n'allait pas fort.

    Ultime ironie du sort, j'avais mes billets pour le concert de reformation au Zénith, mais j'avais dû les revendre car le même soir, Peter Gabriel jouait à Bercy sur sa tournée symphonique.

    C'est vrai qu'au final, c'est un groupe qui n'a pas vraiment été à la hauteur des espoirs qu'on avait mis en lui. Il reste quand même trois très bons disques, et trois autres honorables (même si inégaux), ce n'est pas si mal.

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